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24 heures chrono

24 heures chrono


Heure 0 :

Après avoir passé une journée de repos dans une maison abandonnée, du fait d’une tempête de neige, nous arrivons à la frontière entre la Turquie et la Géorgie. La frontière se passe par une autoroute qui longe la côte de la mer noire. Sur plusieurs kilomètres, une longue file de camions (50 environ) encombre la voie de droite. Des bouchons dû aux intempéries ? Non, ils attendent de se faire contrôler à la frontière. Pauvres chauffeurs… Il faut au moins cinq minutes par camion pour passer.


Arrivés au premier guichet, nous faisons la queue avec les bus et les voitures. Le chauffeur juste derrière nous, nous prend en photo. La traversée du lieu en vélo ne semble pas commune. En toquant sur son parebrise, il nous demande de nous retourner et de lui faire un petit coucou. La frontière Turque passée, nous devons ensuite passer la frontière Géorgienne, (le second guichet) celle-ci est réservé aux piétons (qui viennent faire leurs courses dans la zone duty free essentiellement). Les sacoches doivent passer au scanner. Voilà encore une transition toute en douceur, « Welcome to Georgia ! ». Nous passons de la grosse route enneigée à un hall de centre commercial.


Heure 1 :

Nous voici en Géorgie. Nous continuons de longer la côte. Cependant, les nuages entrent dans la danse. En quelques instants, la neige tombe en abondance. Pantalons et gants de pluie sortis, nous avançons péniblement du fait de la neige venant de face. Nous nous arrêtons à la première boutique que nous voyons pour acheter à manger. La tempête ne fait que s’amplifier. Nous avons un petit air de déjà-vu (Istanbul souvenir…)


Heure 2 :

Nous nous abritons dans un abribus pour manger. Fromage, Olive et pain au menu. Un vielle homme vient à notre rencontre. Il ne semble pas arriver à prendre en compte l’idée que nous ne parlons pas géorgiens. Nous appliquons donc le langage universel que nous commençons à connaître, le langage des grands gestes. Nous arrivons à lui donner des informations à propos de notre voyage. Soudain, une voiture de police arrive à notre niveau. Un policier sort. D’un air amical, il écoute le vielle homme qui semble lui décrire notre situation. Le policier nous fait comprendre que le vieil homme essaie de nous inviter chez lui pour passer la nuit. Nous n’avons fait que vingt kilomètres, il est 14h, mais, du fait de la neige, le choix ne se fait pas attendre. Espérer en faire plus de dix avant la fin de la journée semble relativement optimiste. Le policier nous fait comprendre qu’on sera toujours bien accueilli en Géorgie. Puis remonte dans sa voiture et nous salue.


Heure 3 :

Tout en finissant nos sandwichs, nous suivons notre hôte. Il n’habite qu’à quelques centaines de mètres de là où nous avions établi notre festin. Nous arrivons sur une grande maison verte à deux étages. Petit détail, la décoration est faite de vieux four industriels. Nous frôlons la jouissance instantanée en pénétrant dans le salon. Chauffé au poêle à bois, nous encerclons ce dernier comme des chiens errants autour d’un os mal rongé. Voilà nos équipements biens séchés ! Trois personnes semblent vivre ici. L’homme qui nous a invité, sa femme et une autre femme qui semble être leur fille.


Nous entamons alors notre habituelle description à l’aide de grands gestes et de gémissements, mélangeant français, turque, anglais et les quelques mots de géorgiens issu de notre cher ami Google. Cependant la perte en ligne est élevée. Nous n’arrivons pas à déterminer si notre hôte est un ancien pêcheur ou un ancien militaire.


Mais qu’importe, le premier café (que nous avons le culot d’attendre) arrive. Préparé à la méthode turque, la force du goût est palpable mais semble fortement atténuée par la présence du marc au fond de la tasse. Alors que nous ne ressentons habituellement que le fruit du café, le marc donne également un petit gout supplémentaire. La description semble complexe à faire, mais la différence entre les deux méthodes de préparation est équivalente à celle entre les olives dénoyautées ou non. En même temps, nous mangeons de très bonnes oranges cueillies au jardin. Leur acidité est surprenante par rapport au climat dans lequel elles poussent.


Heure 5 :

Nous ne faisons strictement rien. Nos esprits sont absorbés par la chaleur du poêle. Mais le second goûter ne se fait pas attendre. La vieille femme nous prépare un très bon encas, bête comme le monde : des morceaux de pain à tremper dans du lait (extraite de la vache de la maison) sucré. Il fallait juste y penser…


Nous recommençons à discuter. L’influence russe dans la région se fait sentir. L’homme insiste pour nous faire comprendre comment la vie sous l’union soviétique était meilleure et comment les américains ont entubé les pays de la région (cette traduction des coups de reins donnés par l’homme, donne le meilleur équilibre entre représentativité et politiquement correct).


Heure 6 :

Une jeune femme entre dans la maison. Après un certain temps de latence (dont nous ignorons l’origine), nous en déduisons qu’il s’agit surement de la petite fille de nos hôtes et que l’autre femme est la mère. Notre théorie est renforcée par l’arrivé d’un homme, Jimmy, qui semble être le père, quelques instants plus tard. Cependant la fille l’appel par son prénom, c’est donc peut-être son oncle. Quoi qu’il en soit, il nous indique qu’il est pêcheur. Nous continuons nos discutions jusqu’au repas du soir.


Au menu, poissons crus pêché par Jimmy, mandarines et oranges du jardin et une sorte de salade de poivrons. Petit détail que tue, nous mangeons à la main. Les femmes remplissent les assiettes et les verres pendant que les hommes mangent. Enfin une maison qui tourne rond !


La fin de la soirée se rythme par les tours de magie de Jimmy, pas toujours réussi mais nous rigolons bien. Puis juste avant de nous coucher il nous fait un mélange citron pressé, eau et sucre, qui passe merveilleusement bien avant de commencer la nuit.


Heure 20 :

La nuit aura été bonne. Il n’y a pas de chauffage dans les chambres mais les couvertures sont bien épaisses. Quelques excursions dans la neige, jusqu’au fond du jardin, pour aller au toilettes, auront été nécessaires.


La neige est prévue pour les trois prochains jours. Après une réflexion relativement longue avec le regard vide devant la neige qui continue de tomber, nous décidons de prendre le train pour éviter la zone concernée.


Direction la gare ! Frais comme au premier jour (ou pas), nous enfourchons nos montures. Le vieil homme nous accompagne jusqu’à la route. A peine nous voilà partis que nous sommes déjà pris en embuscade. Le commerçant du coin nous offre le thé. Un second repart bredouille : il n’aura par dégainé assez vite pour nous offrir le sien.


Heure 22 :

Nous voici en plein bourbier blanc géorgien. Petit détail par rapport à la Turquie, la route est partiellement recouverte de petits tas de neige gelés. Les sacoches sont secouées et notre sens de l’équilibre, éprouvé. Nous cherchons à rejoindre la ville de Batumi, toujours sur la côte. Dans le centre de la ville, nous découvrons la mayonnaise de la mer noire. Un mélange de neige fondue, de glace pilée, de goudron, le tout servi dans des nids de poule.


Heure 23 :

Après avoir bien tourné autour de la ville (19km au lieu de 8km, ndlr), nous arrivons à la gare. Au guichet, nous demandons le prochain train pour la capitale, Tbilissi. On nous indique qu’il n’est pas avant 1h30 du matin et que les vélos ne sont pas acceptés. Quelques secondes plus tard, un autre homme demande le même train, mais cette fois, il y en à un à cinq heure de l’après midi.

Mais notre ange gardien ne se fait pas attendre. Un homme nous apporte le café. Dans un très bon anglais, il nous aide à acheter les billets pour le train. Le train de cinq heure est, en fait, plein. Nous devons attendre celui de la nuit et nous devons emballer les vélos. « A l’aide de quoi ? » se demande l’homme. Aussitôt, il interpelle le taxi d’à côté. Il lui demande d’aller acheter du film plastique et du scotch dans le centre ville. « N’avez vous pas faim ? » nous demande t’il. Sans même attendre la réponse, il nous achète quelques spécialités de la région dans la boutique d’à côté. Il nous propose même de nous payer le train mais nous refusons, n’abusons pas. Coulis sur la cerise du gâteau, il nous donne quelques pièces pour aller au toilettes, vu que nous avons 9h à attendre dans la gare, et il part ensuite prendre son bus. Ce géorgien vit en fait au Canada et a déjà voyagé à vélo. Sa version de l’influence de la Russie sur la Géorgie est complétement inverse à notre hôte de la veille. En effet, il considère que c’est la Russie qui a fait de la Géorgie un pays pauvre. Mais peu importe nos avis politiques, le contact d’humain à humain est toujours plein d’hospitalité (Cela nous fait penser à une phrase qu’un Sud-Africain nous avait dit à Istanbul, « Il n’y a pas de mauvais hommes, seulement de mauvais gouvernements »).


Si la Turquie avait déjà mis la barre haute en terme d’hospitalité, la Géorgie a littéralement explosée les records. Voilà à peine vingt quatre heures que nous avons passer la frontière que la Turquie paraît déjà loin. On a beau avoir tendance à raccourcir nos journées en se levant tard et en se couchant tôt, les expériences vécues sont de plus en plus nombreuses. Enfin, la neige se trouve bien être notre meilleure ennemie, elle nous empêche de nous déplacer, mais nous fait voyager plus que jamais.




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